samedi 23 mai 2009

Fortune at the bottom of the pyramid: une nouvelle théorie révolutionnaire?

BOP fait référence aux mots « bottom of the pyramid », désignant les personnes situées tout en bas de la pyramide des richesses, qui sont le groupe socioéconomique le plus pauvre de la société (revenus annuels inférieurs à 3 000 $ en parité de pouvoir d'achat) La théorie dite BOP repose sur deux postulats:

  1. il existe un marché auprès des populations les plus pauvres.
  2. le secteur privé peut contribuer à la lutte contre la pauvreté en s'implantant sur ces marchés.

Théorisée par les travaux des économistes américains C.K. Prahalad et Stuart L. Hart (voir bibliographie), l'approche BOP réconcilie secteur privé et institutions du développement autour d'une idée: rendre accessible certains biens et services aux populations pauvres contribuerait à leur développement et à l'amélioration de leurs conditions de vie. Le rapport « the next 4 billion » évoque quant à lui « une approche basée sur le marché pour réduire la pauvreté (market-based approach to poverty reduction) pour décrire les approches dites BOP.

Pour décrire brièvement la théorie, on trouve d'un côté des entreprises et grands groupes multinationaux qui opèrent sur des marchés occidentaux saturés, et de l'autre des millions de consommateurs potentiels dans les pays en développement. La théorie BOP fait converger les deux en incitant les premiers à développer leurs activités auprès des seconds.

  1. Postulat 1: il existe des marchés/ opportunités économiques au sein des populations pauvres/ pays en développement

Par un calcul économique simple, de nombreux économistes en sont arrivés à la conclusion qu'il existe bel et bien un marché au sein des populations pauvres dans les pays en développement.

D'une part, les pauvres représentent plusieurs milliards d'individus et d'autre part, ils disposent de revenus non négligeables, et bien souvent de certains capitaux matériels ou immatériels de valeur (maison, animaux, savoir-faire spécifique). En outre, il faut ajouter à cela leurs revenus piégés par l'économie informelle: leurs salaires, biens (maisons ou autres) n'existent pas juridiquement aux yeux de leur société, et n'ont donc techniquement aucune valeur. On parle alors de capital mort, ce capital « dormant du fait de l'absence de mécanismes juridiques de propriété fixant le potentiel économique de ces biens » (Et les Clients Pauvres?). Les économies des pauvres représenteraient selon Hernando de Soto, auteur de l'ouvrage Le mystère du capitalisme 40 fois le montant total de l'aide étrangère reçue dans le monde entier depuis 1945.

Les pauvres ont donc finalement des revenus, un capital et un pouvoir d'achat conséquents; ajoutés à cela, des besoins de consommation qui sont encore aujourd'hui insatisfaits dans les domaines de l'alimentation, de l'énergie, de la santé, du logement ou des transports. Toutes les conditions sont finalement réunies pour permettre aux spécialistes de parler de marchés des pauvres, dont la valeur est estimée à 5 000 milliards de dollars par la Banque Mondiale, montant significatif mais sans doute surestimé.

  1. Postulat 2: le secteur privé a un rôle à jouer dans la lutte contre la pauvreté

Contrairement aux idées reçues, le développement des populations pauvres ne passe pas uniquement par les aides publiques et les actions de la société civile (ONG, CBOs...). La théorie des BOP confère au secteur privé un rôle dans la lutte contre la pauvreté. En apportant des biens et services jusque là inaccessibles à ces populations, les entreprises peuvent les aider à améliorer leur vie et à réduire leurs dépenses de consommation courante. En effet, il est courant que les pauvres paient plus chers pour des biens que les populations plus riches (dans les bidonvilles ou en milieu rural, les prix des biens sont souvent plus importants que dans les villes).

La théorie BOP convie les entreprises à développer de nouveau business models qui visent les pauvres, en révolutionnant leurs process marketing, de production ou encore de distribution mais aussi en innovant pour rendre les produits abordables pour les pauvres.

Le développement de l'activité entrepreunariale auprès des populations pauvres est donc présenté dans cette théorie comme le meilleur moyen de lutter contre la pauvreté.


Partant du principe que les pauvres représentent la majorité des individus sur cette planète, et qu'ils disposent de certains revenus considérés comme faibles mais très importants lorsque agglomérés, la théorie des BOP met en évidence l'existence d'un potentiel de consommation largement inexploité chez ces populations pauvres, et incitent les grandes firmes multinationales à s'implanter sur ces marchés qui représentent selon la Banque Mondiale et d'autres instances environ 4 milliards de clients potentiels.

La théorie des BOP peut paraître simpliste, en essayant de faire converger la recherche du profit d'une entreprise et la lutte contre la pauvreté. Mais son plus grand avantage est d'inciter les entreprises et les pouvoirs publics à réfléchir à de nouvelles stratégies de lutte contre la pauvreté basées sur les partenariats entre secteur public et secteur privé et satisfaisant les intérêts des pauvres comme des entreprises.

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